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22.04.2022

Louis Pasteur, PÈRE DE L'ŒNOLOGIE MODERNE

SI LE BIOLOGISTE S’EST OFFERT UN ACCÈS ROYAL AU PANTHÉON DES SCIENCES POUR SES REMARQUABLES TRAVAUX SUR LA PASTEURISATION ET LA VACCINATION, IL EST INTÉRESSANT DE SOULIGNER QUE, GRAND AMATEUR DE VIN, IL FUT ÉGALEMENT UN BIENFAITEUR POUR LA VITICULTURE.

« Pendant des millénaires, l’élaboration du vin est restée l’affaire exclusive des vignerons. Des techniques transmises de génération en génération dans le but d’élaborer l’excellence : sélection de terroirs, de cépages, travail de la vigne… Des rituels quasiment magiques qui s’accomplissaient dans le mystère des caves », rappellent les biologistes François Gros et Béatrice Salviat, auteurs de référence sur le sujet. Agé de 41 ans, Pasteur est déjà connu pour ses recherches sur la fermentation. Ses travaux vont compléter les théories existantes, élaborées jusqu’ici par les chimistes. « Contrairement aux idées en cours, Pasteur affirme que ce processus est “œuvre de vie” et non de décomposition, car il s’enclenche exclusivement sous l’action d’êtres vivants. » En effet, comment expliquer, sinon par un mystère d’ordre divin, que le moût de raisin se mette à bouillonner spontanément dans le pressoir sans qu’aucun feu ne soit allumé sous la cuve ? Il faudra patienter jusqu’au XVIIIe siècle pour que la science permette une meilleure compréhension des mécanismes naturels à l’œuvre dans la vinification. Déjà convaincu du rôle des micro-organismes dans la fermentation, Louis Pasteur se replie dans sa maison familiale d’Arbois, aujourd’hui propriété de l’Académie des sciences, afin d’accomplir une mission que lui a confiée l’Empereur Napoléon III, principalement faire face aux maladies de la vigne. « À chaque fois qu’il étudie un échantillon de vin altéré, Pasteur y trouve, à côté de la levure ordinaire, des ferments distincts de cette levure, bien sûr, et de morphologies différentes selon le type de maladie. Il en conclut que ces germes inhabituels sont responsables des maladies observées et qu’ils provoquent des altérations issues de fermentations. » Véritable pas de géant pour l’œnologie, Pasteur identifie ainsi les quatre microbes qui, en se développant dans le vin, altèrent ses qualités gustatives.

NAISSANCE DE LA PASTEURISATION

Pasteur imagine d’abord d’adjoindre au vin des substances antiseptiques de façon à tuer les germes indésirables tout en préservant les éléments organiques du vin. Mais, les expérimentations s’avèrent peu concluantes. Il s’oriente alors vers une autre solution, recommandant de chauffer le vin en absence d’air. Il sera finalement abandonné en raison d’un inconvénient majeur : s’il permet une conservation parfaite, il tue le vin en empêchant les fermentations qui se produisent après l’embouteillage et permettent sa maturation. La pasteurisation du vin a donc peu à peu été remplacée par une hygiène rigoureuse durant les vendanges et la vinification. « On sait maintenant éviter les quatre “mauvais” microbes découverts par Pasteur (il n’y en a pas plus aujourd’hui), qui se multiplient dans le vin et, au contraire, y favoriser le développement des “bons” microbes en jouant sur la température du vin, son exposition à l’air ou encore en l’additionnant de sucre ou de produits chimiques, tout cela dans des limites définies et contrôlées par l’État ». Pasteur a permis des progrès considérables dans la façon d’élaborer et de conserver le vin, si bien que de nombreux vignerons considèrent aujourd’hui encore Pasteur comme un bienfaiteur de la viticulture, voire comme le fondateur de l’œnologie moderne. Nul doute que cette reconnaissance réjouirait le scientifique. Car, bien qu’ayant contribué de façon décisive à l’élucidation des mystères autour de la fermentation du vin, Louis Pasteur n’entendait nullement le désacraliser. « Le vin, affirmait-il, est la plus saine et la plus hygiénique des boissons. » Une vérité à laquelle on ne peut accéder qu’au moyen d’une joyeuse connaissance intime.